Une Analyse des Coûts Salariaux en France
Florent Menagaux, le directeur général de Michelin, a récemment partagé des réflexions sur la question des coûts salariaux lors d’auditions au Sénat. Selon lui, le principal obstacle en France n’est pas tant le montant des salaires en eux-mêmes mais plutôt la différence significative entre le salaire brut et le montant net perçu par les employés. Cette problématique s’incrit dans un contexte plus large de crise que traverse la filière automobile et soulève des enjeux majeurs pour la compétitivité de l’industrie en Europe.
Compétitivité Européenne en Déclin
Menagaux a pointé du doigt la situation alarmante de l’industrie automobile en Europe, souffrant particulièrement de la concurrence accrue avec des producteurs asiatiques. Il a révélé que si l’on prenait comme référence 100 le coût de production de Michelin en Asie, celui des États-Unis atteignait 127 en 2019 et 176 en 2024, tandis que l’Europe figurait à 134 en 2019 et à 191 en 2024. Ce constat nerveux a conduit le dirigeant à conclure que les coûts de production en Europe étaient désormais presque deux fois plus élevés que ceux en Asie.
Cette hausse des coûts, selon Menagaux, est en grande partie attribuable à l’augmentation des prix de l’énergie, une ressource essentielle pour l’industrie pneumatique. Malgré les efforts de décarbonation, la France se retrouve avec des tarifs énergétiques plus élevés que ceux des États-Unis, ce qui n’améliore pas la situation. En parallèle, la pression inflationniste a conduit à une augmentation générale des salaires, aggravant les défis auxquels les entreprises font face. En outre, la lourdeur de la fiscalité française influence directement la rentabilité de la production, ce qui soulève la question de la compétitivité des entreprises françaises sur le marché global.
Le Dilemme des Salaires et de la Fiscalité
Florent Menagaux a également évoqué la question des salaires au sein de son entreprise, en insistant sur le fait qu’il souhaite instaurer un salaire jugé « décent » pour tous les employés en France. Toutefois, il a mis en lumière les coûts associés à l’augmentation des salaires, qui ne bénéficient finalement qu’en partie aux travailleurs. Par exemple, pour 100 euros brut versés à un employé en France, le coût réel pour l’entreprise est de 142 euros, dont seulement 77,5 euros parviennent au salarié sous forme de salaire net. À titre de comparaison, en Allemagne, le même salaire brut coûte 120 euros à l’employeur tandis que le salarié en perçoit 80. Ces différences soulignent la complexité du système salarial français et créent un climat de mécontentement tant chez les employeurs que chez les employés.
Menagaux a déclaré que le problème fondamental réside dans l’écart entre le salaire brut et le montant net perçu par les employés, ce qui aggrave la perception d’une surcharge des coûts en France. Ce sentiment est partagé par divers acteurs économiques, y compris des personnalités politiques, qui s’interrogent sur la capacité de la France à maintenir des finances publiques équilibrées dans ce contexte de prélèvements obligatoires élevés.
Les Défis de la Réglementation
Un autre point soulevé par le dirigeant de Michelin concerne les lourdeurs réglementaires en Europe, qui entravent la prise de décisions à long terme et compliquent les projets d’investissement. Menagaux a souligné la difficulté liée à l’application d’une directive européenne qui, appliquée dans 27 pays avec des spécificités locales, complexoifie le paysage réglementaire. Cette situation engendre ce qu’il appelle un véritable « cauchemar administratif » pour les entreprises, qui se voient contraintes de jongler avec des exigences variées et des surenchères locales.
Dans un contexte de mondialisation où les concurrents asiatiques et américains intensifient leur pression, la nécessité d’une réforme de la réglementation européenne devient urgente. Menagaux conclut que si des actions ne sont pas entreprises pour alléger la pression fiscale et réglementaire, l’Europe risque de perdre sa compétitivité sur le marché mondial, entraînant des conséquences désastreuses pour des industries clés comme celle des pneumatiques.