Crise de gouvernance chez SMCP : des amendes en perspective
Des tensions au sein du groupe de mode français SMCP, dont les actionnaires chinois pourraient faire face à des amendes s’élevant à 1,4 million d’euros pour des infractions constatées. L’Autorité des marchés financiers (AMF) enquête sur des accusations de franchissement de seuil, de diffusion d’informations fallacieuses et de manipulation de marché. Au cœur de ce tourbillon se trouve Chenran Qiu, la dirigeante chinoise, qui serait directement impliquée dans des manœuvres financières obscures.
Actuellement, un bloc de 16% du capital de SMCP reste en litige, suite à la vente de 12 millions d’actions en 2021. Chenran Qiu, ainsi que deux entreprises, European Top Soho (ETS) et Dynamic Treasure Group (DTG), sont sous le coup de sanctions financières qui pourraient s’élever respectivement à 700.000 euros, 400.000 euros et 300.000 euros. La directrice générale de SMCP, Isabelle Guichot, a décrit cette situation comme un véritable « enfer » pour l’entreprise et ses 6.000 employés, ajoutant qu’il en va de la crédibilité et du potentiel de croissance du groupe.
Une situation complexe de propriété
Le conflit sur la propriété des actions a pris une tournure inattendue après que le conglomérat chinois Shandong Ruyi, actionnaire majoritaire de SMCP lors de son introduction en Bourse en 2017, ait perdu une partie significative de son capital au profit de créanciers regroupés sous l’entité GLAS. Cette dernière détient désormais 29% du capital de SMCP et ambitionne de vendre ses parts pour récupérer des fonds. Pourtant, la situation se complique avec la récente cession de 16% à Chenran Qiu, à travers le trust DTG, une manœuvre qui pourrait bloquer l’identification d’un actionnaire de référence pour SMCP.
Isabelle Guichot souligne que cette situation entrave la possibilité pour SMCP de se retrouver avec un actionnaire solide, d’où la nécessité d’éclaircir les relations d’actionnariat au sein du groupe. Elle indique que cet imbroglio constitue un frein à la croissance de l’entreprise.
Accusations de conflit d’intérêts
Les investigations menées par l’AMF révèlent que Chenran Qiu aurait eu une position duale de vendeuse et d’acheteuse lors de la cession des 12 millions d’actions qui, aujourd’hui, valent 40 millions d’euros. À la suite de cette opération, ETS, qui contrôlait 8% des parts après la cession, avait initialement refusé de divulguer l’identité de l’acquéreur, avant d’admettre que c’était en réalité DTG. Cette situation soulève des questions sur le rôle réel de Chenran Qiu au sein de ces entités, qui rendent déjà nébuleux la transparence de l’actionnariat de SMCP.
Implications de l’enquête de l’AMF
Un membre de l’AMF a déclaré que l’enquête avait établi un lien évident entre DTG et Chenran Qiu, contredisant ainsi les dénégations de cette dernière qui avait affirmé ne pas exercer de contrôle sur la société DTG. Bien que ses avocats reconnaissent des défauts dans les déclarations de propriété, ils soutiennent que ceux-ci n’étaient pas intentionnels, attribuant cela à une crise de gouvernance au sein d’ETS à cette époque. Ils ont également évoqué le manque de compréhension de Chenran Qiu des règles en vigueur en France.
Si la défense cherche à minimiser les implications, la représentante de l’AMF a requis une amende significative à l’encontre de SMCP pour un manquement à la confidentialité des informations sensibles, suite à la publication prématurée d’un projet de communiqué sur les résultats annuels de l’entreprise. SMCP rejette la responsabilité sur son ancien prestataire informatique, tout en mentionnant des mesures correctrices mises en place depuis.
Cette affaire met en lumière les défis de gouvernance auxquels est confronté SMCP, soulevant des préoccupations sur la clarté des droits des actionnaires et la transparence des transactions financières dans un contexte international complexe. La Commission des Sanctions de l’AMF devrait rendre son verdict dans les semaines à venir, et l’issue de cette affaire pèsera lourd sur l’avenir du groupe.