Détente numérique : le phénomène des soirées sans téléphone
Payer 9,50 livres pour participer à une soirée sans téléphone à Londres attire de plus en plus de jeunes. Ces événements, organisés par le « Offline Club », rencontrent un succès fulgurant et se remplissent rapidement. La dernière session a accueilli plus de 150 participants, principalement des jeunes adultes âgés de 20 à 35 ans. Pour ces deux heures de déconnexion, ils sont prêts à payer pour redécouvrir la convivialité des échanges en face à face.
Lois Shafier, une participante qui a décidé de laisser son téléphone à l’entrée de l’événement, confie qu’elle est venue exactement pour cela. Elle explique qu’aujourd’hui, malgré la domination des réseaux sociaux et de la technologie, beaucoup de gens cherchent à se reconnecter au monde réel. À ses côtés, Bianca Bolum, 25 ans, une créatrice de bijoux qui a déjà assisté à ces soirées, partage son désir de faire de nouvelles connaissances sans le filtre des écrans. Elle souligne que cette quête de contact authentique est devenue primordiale dans une époque saturée par la virtualité.
Une dépendance numérique révélée
D’après des études menées par le régulateur britannique Ofcom, les jeunes adultes passent en moyenne plus de quatre heures par jour sur leur smartphone. Pour certains comme Liliann Delacruz, 22 ans, ce temps peut atteindre dix heures quotidiennes, entre échange avec ses proches et navigation sur les réseaux sociaux. Ce constat est partagé par Harry Stead, un ingénieur de 25 ans, qui souligne combien il est difficile de résister à l’envie de vérifier son téléphone constamment. Cette anxiété de rater quelque chose — la fameuse « FOMO » — devient une réalité pour de nombreuses personnes.
Dans l’espace de l’événement, des jeux de société et du matériel artistique sont mis à disposition, favorisant les interactions sans écran. Un environnement ludique qui contribue à la détente et à la création de liens. Harry Stead se dit libéré d’avoir laissé son téléphone ; il se rend compte que souvent, il se sent obligé de l’utiliser, même lorsque ce n’est pas nécessaire.
Vers un besoin de connexions authentiques
Lois Shafier avoue quant à elle avoir une relation ambivalente avec la technologie. Bien qu’elle se sente accro à son téléphone, elle ressent également le besoin de s’en libérer, ne serait-ce que pour un moment. Ce paradoxe est partagé par de nombreux participants, qui découvrent souvent les événements du « Offline Club » par le biais des réseaux sociaux. Ben Hounsell, le créateur du club, réfute l’idée d’une opposition à la technologie : il constate plutôt que de nombreuses personnes prennent conscience des bienfaits de la déconnexion, même temporaire. Depuis son ouverture, le club a rassemblé plus de 2000 participants, ce qui témoigne d’un intérêt grandissant pour ce type d’initiatives.
Une expansion à l’international
Le concept du « Offline Club » ne se limite pas à Londres. Des soirées similaires se tiennent maintenant à Paris, Barcelone et même à Dubaï. L’idée originale vient d’Amsterdam, où Ilya Kneppelhout, avec quelques amis, a décidé de créer ce lieu de rencontre. Il souligne qu’il existe bel et bien une addiction au smartphone et que de nombreuses personnes l’utilisent alors qu’elles savent que cela peut nuire à leur bien-être. En outre, cette initiative répond à ce que certains qualifient d’« épidémie de solitude », dans un monde où les interactions authentiques sont souvent éclipsées par les interactions numériques.
Des alternatives pour déconnecter
Pour ceux qui cherchent à s’éloigner de leur téléphone au quotidien, il existe des retraites dédiées à la déconnexion dans plusieurs pays. Ces retraites offrent aux participants l’opportunité de se recentrer sur eux-mêmes, loin des distractions numériques pendant plusieurs jours. Par ailleurs, des applications permettent aux utilisateurs de fixer des limites sur leur temps d’utilisation des réseaux sociaux, et le mode noir et blanc de l’écran peut réduire l’attrait du smartphone. Anna Cox, professeure à l’University College London, insiste sur l’importance d’éduquer les jeunes à prendre le contrôle de leur utilisation des appareils, afin de favoriser un rapport plus équilibré à la technologie.
Alors que le besoin de déconnexion se fait ressentir chez de nombreux jeunes, des initiatives comme le « Offline Club » semblent offrir une réponse adaptée, en favorisant les échanges réels et en réduisant la dépendance aux écrans, dans une société de plus en plus connectée.