L’Algérie à la présidence du Conseil de sécurité des Nations Unies : Un mois sous tension
L’Algérie exerce pour un mois la présidence tournante du Conseil de sécurité des Nations Unies, dans un contexte diplomatique marqué par des développements significatifs concernant le conflit du Sahara marocain. Ce dossier, source de tensions régionales, a pris un tournant avec l’adoption de la résolution 2756, qui renforce la position du Maroc en mettant en avant son initiative d’autonomie, largement soutenue par l’ONU et de nombreux pays comme solution privilégiée au conflit.
Cependant, l’agenda de cette présidence algérienne a suscité des interrogations en raison de l’absence totale de toute mention relative au Sahara marocain. Cette omission est d’autant plus surprenante que l’Algérie revendique cette question comme une priorité de sa politique étrangère. Cette décision a engendré des interrogations parmi les observateurs et les acteurs concernés par ce dossier.
Éviter les discussions sensibles
Pour certains analystes, cette absence est significative d’une volonté d’évitement de la part de l’Algérie face à des débats diplomatiques potentiellement défavorables. Selon un expert, « l’Algérie choisit de ne pas aborder ce sujet pour éviter des conséquences diplomatiques négatives, alors même que la reconnaissance internationale de la marocanité du Sahara ne cesse de croître ». Cette stratégie est aussi influencée par l’escalade des tensions avec le Polisario, suite à son retrait d’un accord de cessez-le-feu, plaçant ainsi Téhéran dans une situation délicate.
Ammar Ben Jamaa, représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations Unies, a justifié ce silence en indiquant que le Conseil de sécurité avait récemment prolongé le mandat de la MINURSO. Il a ajouté que l’Algérie ne prévoit pas de soulever cette question à moins d’un événement nouveau justifiant une telle démarche, tout en réaffirmant son engagement pour l’autodétermination au Sahara marocain.
L’analyste politique et spécialiste en relations internationales, Lahcen Aqartit, considère que cette exclusion témoigne des défis diplomatiques rencontrés par l’Algérie suite à l’adoption de la résolution 2756. Celle-ci, en renforçant la position marocaine, met également en évidence les nouveaux soutiens internationaux dont bénéficie le Maroc, comme le récent appui de la France ou l’ouverture d’un consulat tchadien à Laâyoune. Ainsi, ces éléments pourraient être perçus comme une stratégie misant sur la victoire marocaine et plongeant l’Algérie dans une impasse.
Un équilibre délicat
Discuter à nouveau de cette question au Conseil de sécurité pourrait conduire à des votes défavorables pour l’Algérie, renforçant encore davantage la position marocaine, estime Aqartit.
Abbas El Ouardi, professeur de droit public à l’Université Mohammed V de Rabat, partage cette opinion et souligne que l’Algérie ne peut plus faire apparaître ce dossier à l’agenda du Conseil de sécurité. Il explique que « le calendrier de la présidence algérienne ne permet pas de relancer le sujet, malgré la volonté de son représentant d’utiliser cette plateforme internationale à l’avantage du régime ».
El Ouardi a également souligné les limites posées par les résolutions du Conseil de sécurité, qui soutiennent les acquis marocains. Il conclut que l’Algérie demeure contrainte par ces résolutions, malgré toutefois ses tentatives d’influencer l’évolution de la question.
Ce mois de présidence au Conseil de sécurité illustre la complexité de la position algérienne face à une diplomatie marocaine en plein essor, notamment par l’ouverture de consulats dans les provinces du Sud. L’Algérie semble ainsi adopter une approche prudente, voire défensive, pour éviter de creuser son isolement.